lundi 23 septembre 2019

QUI POUR METTRE FIN A LA TRAITE DES TALIBES AU SENEGAL?

Après le débat sur les élèves de l’Institut Sainte Jeanne d’Arc qui a vu beaucoup de gens y aller avec verve et détermination, venez on parle maintenant de la traite des enfants dans les rues des grandes villes du Sénégal, au nom de la religion.
Les vraies questions de l’heure, nous (la presse d’abord) les occultons souvent, et préférons nous attarder sur des « futilités » (pas forcément, je suis d’accord), genre il est le chargé de communication du parlement de la CEDEAO, il a mangé le thiéré du Tamkharite, Boris et Bachir sont des cracks (quels cracks ? Des invectives entre intellectuels qui soldent leurs comptes et on les érige en super héros, des Einstein des temps modernes).
Parlons de nos questions sociales, parlons des maux de notre Sénégal, parlons de l'emprisonnement injsute du confrère #Adama_Gaye, parlons de l’exploitation des enfants dans la rue, de ces centaines d’hommes et de femmes qui quittent la sous-région avec leurs enfants pour élire domicile dans les moindres recoins de la capitale. Ils sont nombreux à avoir appris le Coran sans jamais passer par ce système. Je le dis ici, l'Islam ne recommande pas l'exploitation de son prochain pour ses propres intérêts.
UN VRAI CREVE-CŒUR : ÇA DOIT CESSER
Ces enfants ne nous font pas pitié là ? En les voyant se précipiter sur les restes des repas de certaines « gargottes » ? Prêts à sauter par-dessus les méandres des assiettes sales dont personne ne veut ? Sur les feux de signalisation maintenant ils n’hésitent même plus à mettre la main et la tête dans le véhicule du passant (d’aucuns disent même qu’il y a des larrons parmi eux – que voulez-vous, il faut assurer le versement quotidien à tout prix).
Le visage qu’offrent ces almoudos crève le cœur. Personne n’a le droit de garder le silence. Des visages éprouvés par la famine, certains sont si maigrichons, des haillons qui collent à une peau tellement sale et pleine de plaies
parfois puantes. En les repoussant, tu as même parfois le sentiment que ta foi n'est pas solide, ou que tu n'es pas un bon croyant.
Pour certains même tu peux voir les traces de larmes sur les joues, avec quelques taches de morve çà et là. Certains leur donnent des pièces, d’autres leur offrent du pain, d’autres les ignorent, tandis que certains peuvent même aller jusqu'à leur crier dessus, tellement « le système » les écœure.
LE TABOU OU LES RAISONS DU SILENCE :
L’argument du sujet tabou et de la question sensible affiche ses limites. Et que personne ne parle de « l’occident nous impose ceci l’occident nous impose cela ». Ma conviction est que si on dénonce de la même manière que la
mesure de l’ISJA ce fléau de la traite des enfants, des solutions peuvent être trouvées.
Surtout de la part de l’Etat du Sénégal d’abord. Parce que l’image qu’offre surtout Dakar est de plus en plus insoutenable : ce n’est plus de la
mendicité, c’est devenu presque « de l’agression », et la plupart se taisent. La responsabilité incombe à tous : vous, moi, les parents, les marabouts, l’Etat, la société etc.
Notre problème au Sénégal c’est que tout est tabou. On préfère garder le silence parce que « c’est sensible ». Sensible quoi ? Où sont tous ceux qui ont parlé de l’affaire Sainte Jeanne d’Arc ? N’était-ce pas un « sujet sensible » pour ne jamais ébranler ce « dialogue des religions » si cher à nous ? Alors pourquoi ce problème qui ne concerne que la religion musulmane va (encore) être passé sous silence ?
Ne pas reconnaître l’acuité de ce problème relève, à mon sens, plus de la complicité que d’une supposé sensibilité à préserver. Le dialogue des religions au Sénégal est beaucoup plus sensible et beaucoup ont parlé. Alors… ?
LE « REINFORCEMENT OF LAW » EST NECESSAIRE :
En administration publique c’est connu que les pays en développement peinent souvent à mettre en œuvre certaines politiques publiques (pour plusieurs raisons, certes). Mais une seule bonne loi bien appliquée est meilleure que dix lois dont la mise en œuvre est tirée par les cheveux.
En juin 2016, à la suite de l’engagement du Chef de l’Etat, le ministère en charge de l’enfance avait entamé le programme de retrait des enfants de la rue, du point de vue légal. Ainsi jusqu’en Mars 2017 une soixantaine d’opérations de rues ont été menées par la police et les travailleurs sociaux dans les rues de la capitale.
Ainsi près de 2000 enfants ont été retirés des rues, recueillis et placés dans des centres d’accueil, l’objectif étant de les rendre à leurs parents. Il est vrai que la restitution ne sera pas chose aisée, car la plupart sont aussi originaires de la Guinée-Bissau, du Mali, de la Gambie et de la République de Guinée. Se donner les moyens de faire appliquer les lois reste alors un impératif pour nous.
CE BUSINESS SI FLORISSANT… :
Plusieurs fois des talibés interrogés ont affirmé être sévèrement frappés ou attachés (ligotés même) parce qu’ils n’ont pas apporté le versement journalier ou ont tenté de fuguer. Certaines infos renseignent même que pour
assurer leur approvisionnement en main d’œuvre suffisant en talibés (pour gagner encore plus) et fidéliser les parents, certains proprios de « Daaras » se seraient mis à leur reverser des pensions.
C’est dire combien c’est devenu un business. Un maître qui a 200 talibés se retrouve donc avec 100.000 francs cfa par jour, ce qui lui fait des retombées mensuelles de 3.000.000 de francs cfa ! Ça rapporte gros, non?
Pas loin de ce qui se passe dans certains pays de l’Europe de l’Est (Bulgarie Roumanie Hongrie) où des gourous recrutent des enfants et des jeunes filles et les dispersent un peu partout dans les autres pays riches (Allemagne
France Italie Pays Bas Suisse etc.). Une sorte d’esclavage moderne (où ils perçoivent des versements, en leur donnant des miettes), qui s’apparente un peu à ce qu’on voit de nos jours.
TROUVER DES SOLUTIONS:
C'est l'Etat qui doit reprendre la question en main, et les autres structures viendront en appoint. A Saint Louis il y a une Association de Solidarité Internationale qui s'appelle "la Liane" avec Madame Claude Hallégot, qui accueille des enfants talibés, les soigne, les nourit et leur donne une éducation décente (j'y ai été et c'est moi-même qui ai pris ces images). Dans d'autres villes du pays, nul doute que des mesures comme ça sont prises.
Cette problématique est à mes yeux plus complexe et beaucoup plus importante qu'une question de voile dans un établissement d'enseignement général. Personnellement il m’arrive plusieurs fois d’acheter une miche de pain et le partager entre talibés. Mais je ne leur donne pas un seul centime. Car, dans mon intime conviction, donner de l’argent aux talibés, c’est maintenir ce business odieux.

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